Catherine Simon, Le Monde
Certains morts ont de l'avenir. Ils deviennent, non pas des
fantômes, mais des ancêtres doués de parole et capables, quelquefois, d'écouter
les vivants. Frantz Fanon, par exemple. Emporté par une leucémie, en 1961, un
an avant l'indépendance algérienne pour laquelle il s'était battu, le
psychiatre martiniquais a laissé derrière lui une oeuvre d'une puissante
radicalité. Et un cercle d'opiniâtres fidèles qui, en dépit du temps,
poursuivent le dialogue avec lui. Parmi eux : le grand écrivain américain John
Edgar Wideman. Son roman, évidemment inachevé – comme le laisse entendre son
titre –, explore mille et une pistes.
En voici une, qui ouvre le récit : un type comme vous et moi
(presque...) décide, près d'un demi-siècle après avoir lu Les Damnés de la
terre (Maspero, 1961), le dernier livre de Fanon, de lui écrire.